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Page:Scott - Nain noir. Les puritains d'Ecosse, trad. Defauconpret, Garnier, 1933.djvu/175

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LES PURITAINS D’ÉCOSSE

J’ai appris par un billet qu’Édith a envoyé à Charnwood pour redemander quelques hardes et des livres, que Claverhouse déjeune chez vous ce matin, et j’ai pensé que ce jeune soldat ne serait pas fâché de causer une heure ou deux avec un vieux mousquet comme moi.

— Très bien, mon frère, et je vous aurais invité si j’avais cru pouvoir le faire à temps. Voyez comme je suis occupée des préparatifs. Je veux que tout soit dans le même ordre que le jour où…

— Où le roi a déjeuné à Tillietudlem ? interrompit le major, qui comme toutes les connaissances de lady Marguerite, tremblait quand la vieille dame entamait ce chapitre, et qui désirait y couper court. — Je m’en souviens parfaitement. — Vous savez que j’étais derrière le fauteuil de Sa Majesté.

— Oui, mon frère, et sans doute vous pourrez m’aider à me rappeler la position exacte de chaque chose.

— Non, sur ma foi ! le maudit dîner que Noll nous servit à Worcester quelques jours après chassa de ma mémoire votre excellent déjeuner. Mais, comment donc ! vous avez même fait mettre le grand fauteuil en cuir de Turquie avec les coussins brodés ?…

— Dites le trône, mon frère.

— Eh bien ! le trône, soit. Est-ce de là que Claverhouse doit procéder à l’attaque du pâté ?  ?

— Non, mon frère ; ce trône ayant eu l’honneur de servir de siège à Sa Majesté, il ne sera jamais, tant que je vivrai, occupé par personne au-dessous du rang d’un monarque. Ce serait une profanation.

— Il ne faudrait donc pas l’exposer à la vue d’un brave cavalier qui dès le matin aura fait dix milles à cheval ; car il me semble qu’il s’y trouverait assis à l’aise. — Mais où est Édith ?

— Sur les créneaux de la tour.

— Eh bien, je vais la rejoindre, et je vous laisse finir l’arrangement ; et si, comme je le pense, vos dispositions sont terminées, vous ferez bien d’y venir avec moi.

En parlant ainsi, le major offrit son bras, avec la politesse d’un ancien courtisan, à lady Marguerite, et elle l’accepta en le remerciant par une révérence telle qu’en faisaient les dames à Holyrood-House avant l’année 1642.

Après avoir traversé, maint passage, gravi maint escalier tournant, lady Marguerite et son frère le vieux Cavalier arrivèrent d’un pas fatigué sur la plate-forme de la tour, où ils trouvèrent Édith, non dans l’attitude d’une personne qui attend avec impatience et