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Page:Scott - Nain noir. Les puritains d'Ecosse, trad. Defauconpret, Garnier, 1933.djvu/291

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LES PURITAINS D’ÉCOSSE

duc ; mais je vous répète que cette démarche est absolument inutile. Quand même Son Altesse aurait quelque inclination à traiter favorablement, le conseil de guerre ne lui permettrait pas de le faire.

— Si cela est ainsi, j’en serai désespéré ; mais je n’en dois pas moins persister à vous prier de me procurer une audience du duc.

— Lumley, dit le major au capitaine, allez annoncer à Son Altesse l’arrivée de M. Morton.

Le capitaine ne tarda pas à revenir ; il dit à Morton que le duc ne pouvait le voir le soir même, mais qu’il le recevrait le lendemain dans la matinée. On le retint comme prisonnier, mais on le traita avec les plus grands égards. Dès le point du jour, Lumley vint chercher le parlementaire.

L’armée se formait déjà en colonnes pour se mettre en marche, et Monmouth était au centre. Les chefs avaient une telle confiance dans leurs forces, qu’ils ne prirent aucune précaution pour empêcher Henry de s’en former une idée. Il s’y trouvait quatre régiments anglais, l’élite des troupes de Charles II, le régiment des gardes, brûlant du désir de venger sa défaite de Loudon-Hill, plusieurs régiments écossais, et quelques compagnies de montagnards écossais, ennemis jurés des puritains. Un train nombreux d’artillerie accompagnait l’armée. Elle avait un air si imposant, que Morton pensa qu’il ne fallait rien moins qu’un miracle pour sauver d’une destruction complète les presbytériens.

— Vous voyez la fête qu’on vous prépare, dit Lumley.

— Si elle avait dû me déplaire, répondit Morton, je ne serais pas ici.

Ils arrivèrent sur une hauteur et où se trouvait le commandant en chef entouré de ses principaux officiers.

Le capitaine Lumley avertit le duc que Morton attendait ses ordres. Aussitôt Monmouth fit signe à ses officiers de se retirer, et n’en retint que deux auprès de lui. Il leur parla quelques instants à voix basse avant de faire avancer Morton.

Il était impossible de voir le duc de Monmouth sans être captivé par les grâces de sa personne. Cependant, aux yeux d’un observateur attentif, quelque chose nuisait à la noble beauté de ses traits : c’était un air d’hésitation qui semblait le tenir en suspens dans les moments même où il était le plus urgent de prendre un parti.

Auprès de Monmouth étaient Claverhouse et un autre officier général, le célèbre général Thomas Dalzell, plus craint et plus détesté des whigs que Claverhouse lui-même.

La présence de ces deux généraux parut à Morton d’un fâcheux augure. Mais, malgré sa jeunesse, son inexpérience, il s’avança hardiment, résolu de défendre dignement son pays et la cause qui lui