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Page:Scott - Nain noir. Les puritains d'Ecosse, trad. Defauconpret, Garnier, 1933.djvu/94

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LE NAIN NOIR

dit-il à Ellieslaw, quelle excuse me donneras-tu ? Tu voulais vendre ta fille pour te sauver d’un danger, comme tu aurais dévoré ses membres, dans un temps de famine, pour assouvir ta faim. Oui, cache-toi, tu dois rougir de regarder un homme dont la main s’est souillée d’un meurtre pour toi, que tu as chargé de chaînes en récompense de ses bienfaits, et que tu as condamné au malheur pour toute sa vie. La vertu de celle qui t’appelle son père peut seule obtenir ton pardon. Retire-toi, et puissent les bienfaits que je t’accorderai encore se convertir en charbons ardents sur ta tête !

Ellieslaw sortit de la chapelle en faisant un geste de désespoir.

— Je n’entends rien à tout cela, dit sir Frédéric Langley. Nous sommes ici un corps de gentilshommes qui avons pris les armes au nom et sous l’autorité du roi Jacques ; ainsi, Monsieur, que vous soyez réellement ce sir Édouard Mauley qu’on a cru mort depuis si longtemps, ou peut-être un imposteur qui veut s’emparer de son nom et de ses biens, nous prendrons la liberté de vous retenir en prison jusqu’à ce que vous ayez donné des preuves bien claires de ce que vous pouvez être. — Saisissez-le, mes amis.

Sir Frédéric, voyant qu’il n’était pas obéi, car les domestiques reculaient d’un air de doute et d’inquiétude, s’avança vers le Nain pour le saisir lui-même ; mais il n’eut pas fait trois pas qu’il fut arrêté par le canon d’une pertuisane qui brilla sur sa poitrine. C’était le robuste Hobbie Elliot qui la lui présentait.

— Un instant, dit celui-ci ; avant que vous le touchiez, je verrai le jour à travers votre corps. Personne ne mettra la main sur Elshie, tant que je vivrai : il faut secourir ceux qui nous ont secourus. Ce n’est pas qu’il en ait besoin ; s’il vous serrait le bras, il vous ferait sortir le sang par les ongles. C’est un rude jouteur.

— Et par quel hasard vous trouvez-vous ici, Hobbie ? lui demanda Mareschal.

— En conscience, Mareschal Wells, j’y suis venu avec une trentaine de bons compagnons pour maintenir la paix, pour secourir Elshie au besoin, et pour payer mes dettes à M. Ellieslaw. On m’a donné un fameux déjeuner il y a quelques jours, et je sais qu’il y était pour quelque chose : eh bien, je suis venu pour lui servir à souper. — Ne portez pas ainsi la main sur vos épées. Messieurs : le château est à nous à bon marché. Les portes étaient ouvertes ; vos gens avaient bu du punch ; nous leur avons enlevé les armes des mains.

Mareschal sortit de la chapelle, et y rentra presque aussitôt. — De par le ciel, sir Frédéric, cela n’est que trop vrai ! dit-il, le château est rempli de gens armés ; nos ivrognes sont tous désarmés,