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Page:Senancour - Rêveries sur la nature primitive de l’homme, 1802.djvu/262

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ses îles ; qu’il est absurde et souverainement funeste que la terre soit divisée en vastes états, tandis que vos politiques eux-mêmes avouent que le peuple d’un petit état peut seul être libre et bon, parce qu’il peut seul connoître l’union et la simplicité. Ou si vous n’êtes pas séduits par ces erreurs vulgaires, quoi ! vous ne frémissez pas de jouer les nations pour la faveur de vos dogmes et l’éclat de votre règne ; vous ne rougissez pas de sacrifier à vos intérêts d’un jour la destinée des générations. Mais vous le savez et vous n’en avez nulle honte, nul remord, et vous ne le désavouez pas, et vous insultez à vos victimes, et elles se taisent. Vous les bravez, et elles vous admirent ; vous écrasez l’homme, et l’homme vous révère ! Qu’êtes-vous donc, ministres d’Ahriman ? et eux que sont-ils, les lâches ? Mais ils tyranniseroient comme vous, et vous ramperiez comme eux. Mortels et vils et méchans !

Pouvoir inexplicable qui fut donné à l’homme d’altérer ainsi sa nature ; d’étendre ses rapports pour multiplier ses douleurs, et son influence pour affliger ses semblables. Je le dirai sans cesse, je le dirai vainement ; mais je ne me lasserai pas de le redire ; laissons