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Page:Senancour - Rêveries sur la nature primitive de l’homme, 1802.djvu/79

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Et toi disciple de la vérité, tranquille solitaire, qui aimes et plains l’humanité souffrante ; homme éclairé, vertueux et aimant ; mais détrompé par la sagesse ou le malheur, quelle est des modifications annuelles celle que tu chéris davantage ? L’automne n’a-t-elle pas surtout entretenu tes méditations, inspiré tes pensées, et ramené ton cœur ? Dans le silence de ses soirées vaporeuses, n’as-tu pas connu une justice plus naturelle, senti plus d’impassibilité philosophique, et pénétré dans une profondeur plus sublime ?

Automne ! saison des cœurs sensibles et des cœurs infortunés, tu es encore la saison du sage, tu imprimes à nos âmes ce caractère précieux de calme et d’indifférence, base nécessaire de toute justice et de toute vérité ; tu disposes à penser et à sentir en sage. Tu es encore la saison de cet homme simple, qui, loin de l’ivresse et de l’amertume des villes, cultive son antique héritage dans les mœurs patriarchales et la paix domestique. Tu payes ses travaux, naturels, tu rassembles sous son toit vénérable les dons de la féconde nature, tu assures son existence durant le stérile hiver, tu le rappelles à son humble foyer. Là, près des siens y il va goûter des joies cham-