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Page:Servières - Richard Wagner jugé en France, 1887.djvu/72

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RICHARD WAGNER JUGÉ EN FRANCE

— Un nouveau débarqué, un étranger, un allemand se débattait à grand’peine au milieu de ces mille formalités que l’administration française accumule sous les pas du voyageur. Roche intervient ; l’étranger se nomme Wagner ! Roche s’incline, se met à sa disposition, le garde dans les bureaux, aplanit toutes les difficultés et quand Wagner le remercie de la peine qu’il lui donne, — « Je suis trop heureux. lui dit Roche, d’avoir obligé un grand art ste. » — « Vous me connaissez ? s’écrie Wagner, surpris de voir son nom si bien connu à la douane française. » — Roche sourit et, pour toute réponse, fredonne quelques morceaux du Tannhœuser et de Lohengrin, — « Ah ! dit Wagner ravi, c’est un signe d’heureux présage… le premier Parisien que je rencontre connaît et apprécie ma musique. Je vais de ce pas l’écrire à Liszt… Mais nous nous reverrons, monsieur. » Et ce disant, il tire de sa malle cinq ou six morceaux de musique et les présente à Roche avec cette dédicace : « À M. Edmond Roche, à la douane[1]. »

Cette anecdote montre et on le verra mieux encore par d’autres noms plus célèbres au nombre

  1. Edmond Roche, né à Calais en 1828, mort à Paris à la fin de décembre 1861, poète et musicien, vivait fort modestement de ses appointements d’employé des douanes. Après sa mort, ses amis firent les frais d’une édition posthume de ses œuvres. Le volume de ses poésies, précédé d’une préface émue dl M. V. Sardou, est accompagné d’un portrait de l’auteur par Grenaud et de gravures de Corot, de Bar, Herst et Michelin, 1 vol. in-18, 1863, Michel Lévy.