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Page:Shakespeare - Œuvres complètes, traduction Hugo, Pagnerre, 1872, tome 11.djvu/524

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EXTRAIT DE LA CHRONIQUE DE FROISSART.

ronne et son royaume en la main du comte d’Erby, duc de Lanclastre.


Les nouvelles vinrent au duc de Lanclastre que Richard de Bordeaux le demandait et avait grand désir de parler à lui. Tantôt ledit duc se départit de son hôtel sur le tard : et vint par une barge sur la Tamise, accompagné de ses chevaliers, au château de Londres : et entra dedans par derrière : et vint en la Tour où le roi était : lequel recueillit le duc de Lanclastre moult doucement, et s’humilia très-grandement envers lui : ainsi que celui qui se voyait et sentait en grand danger. Si lui dit :

— Cousin, j’ai regardé et considéré mon état, lequel est en petit point, Dieu merci : et, tant qu’à tenir jamais règne, gouverner peuple, ni porter couronne, je n’ai que faire d’y penser : et (si Dieu m’aide à l’âme), si je ne voudrais être de ce siècle mort de mort naturelle, et que le roi de France eût retenu sa fille[1]. Car nous n’avons pas pris ni eu guère de joie ensemble, noncques puis que je l’amenai en ce pays. Cousin, tout considéré, je sais bien que je me suis grandement mépris envers vous et plusieurs nobles de mon sang en ce pays, pour lesquelles choses je connais que jamais je ne viendrai à paix ni à pardon. Pourtant de bonne et libérale volonté, je vous veux résigner l’héritage de la couronne d’Angleterre, et vous prie que le don vous prenez avec la résignation.

Quand le duc de Lanclastre ouït cette parole, il répondit :

— Il convient qu’à cette parole soient appelés plusieurs des trois États d’Angleterre : et j’ai mandé les prélats et

  1. Isabelle de France, fille de Charles VI.