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Page:Sicard - Le Laurier Noir, 1917.djvu/100

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Vos berges de la Marne et vos rives de l’Oise
N’ont plus leur mouvement de ponts et de canaux,
Et l’eau qui reflétait vos toits couverts d’ardoises
Est un rouet sans âme auprès d’un noir fuseau.

J’ose à peine, cités, penser à vos terrasses
Où la statue heureuse enlaçait le rosier.
Je crains que trop de sang ne couvre vos espaces,
Que trop de morts ne soient sur vos grands escaliers.

Ô forêt de Compiègne, est-il vrai que les flammes
Ont détruit la splendeur de vos arbres géants ?
Que votre dénuement a dû consumer d’âmes
Et que votre détresse a dû blesser d’amants !

Le pas des obusiers qui fait trembler la terre
Vous a changées, cités, en ténébreux convois.
Mars a tué Vénus sur son lit de lumière.
L’Allemagne a souillé le jardin de nos rois.

La vigne qui grimpait contre l’orangerie
Se traîne, maintenant, sur des lambeaux d’acier.
Le bassin qui riait aux joies de ma folie
De sa vasque n’a fait qu’un éclatant charnier