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Page:Simon - L'écrin disparu, 1927.djvu/112

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L’ÉCRIN DISPARU

sincère qu’il portait à son cher élève, lui avaient insensiblement valu l’estime et la confiance de monsieur Giraldi.

Mais qui sait, si A. Dupras, qui un temps, avait osé prétendre à la main de Madeleine, n’avait pas gardé rancune à monsieur Giraldi du refus de sa fille ?… ne voit-on point les sentiments les moins avouables se parer de dehors attrayants en vue d’arriver à leur fin ? D’ailleurs, Madame Lédia Giraldi ne partageait pas, au sujet du Professeur de Jean, l’optimisme bienveillant de son mari. Elle lui disait :

— Monsieur Dupras est un névrosé, une intelligence mûrie trop vite ; or, toujours la nature prend sa revanche, de succès trop hâtifs. Il m’apparaît comme une imagination déréglée, pour ne pas dire dépravée… Par deux voies différentes, j’ai entendu parler de ses allures étranges, ici, au temps même où anxieux, vous attendiez des nouvelles de Jean, — Bien avant les autres, paraît-il, il a commencé à s’inquiéter, à aller attendre à la barrière, alors qu’aucun retard ne motivait son inquiétude. Le premier, il a affirmé pressentir une catastrophe. Et depuis le malheur, quelle attitude bizarre est la sienne !…

Bien que sa présence n’ait plus sa raison d’être ici, ne vous a-t-il pas supplié de lui permettre de rester ? Il prétend que c’est lui, le professeur, l’ami de Jean, qui doit découvrir l’assassin. Il affecte de chercher des pistes, de soupçonner ceux qui doivent le plus demeurer à l’abri du soupçon. Moi-même, qui vous parle, mon cher ami, et mon vieux chauffeur Harry, qui avons passé la journée à Pointe à Fortune, ne sommes pas à l’abri de ses suspicions.

Puis, remarquez, observa Madame Giraldi, pour mieux se mettre à couvert de toute inculpation, c’est lui-même qui découvrant l’Agenda dans le fossé, l’apporte solennellement devant tout le monde ! N’est-ce pas toujours la vieille histoire du « Pickpoket » qui pour égarer l’opinion est le premier à crier : « au voleur »…

Mais en bonne vérité, conclut Lédia, l’attitude de ce pauvre garçon n’est-elle pas plutôt celle d’un fou, que d’un coupable ? Ainsi, il passe des heures dans le garage, inspectant l’automobile, regardant les roues, entrant dans la voiture, continuant ainsi jusqu’à ce que Harry le chauffeur eût poussé l’intrus à la porte, qu’il ferma à clé.

Depuis lors, il a entrepris des tournées policières à Dorval, à Lakeside, tantôt autour des résidences voisines, tantôt sur la ligne du chemin de fer, du côté où le corps de son élève a