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Page:Simon Levy - Moïse, Jésus et Mahomet, Maisonneuve, 1887.djvu/103

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une partie des êtres raisonnables et libres sous la dépendance de l’autre partie !

Il est vrai, la Bible parle de maîtres et d’esclaves ; elle parle de servitude ; elle la réglemente même. Mais s’ensuit-il qu’elle ait méconnu le principe de la dignité humaine ? C’est ce que nous allons examiner.

Sans doute, en se révélant au peuple hébreu pour lui donner en main le fil conducteur des destinées humaines, Dieu aurait pu changer, transformer soudainement son cœur et le disposer à l’acceptation immédiate des lois civiles marquées au coin de la plus parfaite équité. Rien n’est impossible à la toute-puissance divine. Mais, nous l’avons dit, c’était librement qu’Israël devait accepter sa mission, librement qu’il devait la poursuivre et l’accomplir. Dès là que le don de la grâce céleste fût descendu sur lui, non pas tant pour le seconder et le soutenir, que pour lui inspirer des prédispositions spéciales, il n’eût plus été que le peuple favorisé ; il cessait d’être le peuple méritant, le peuple digne d’être admiré pour son dévouement à la cause de la vérité.

Moïse, en fidèle interprète de la volonté de Dieu, ne pouvait donc pas précisément parler à Israël comme ferait un moraliste ; il fallait avant tout qu’il lui parlât sur le ton d’un législateur. Le présent ne devait pas moins l’occuper que l’avenir. Bien plus, c’était par le présent qu’il fallait songer à fonder l’avenir. Rien ne pouvait être précipité, forcé. La voie d’un progrès lent, mais régulier et sûr, était la meilleure à choisir. C’est aussi celle qu’il prend. C’est la voie même de Dieu. Or, que trouve Moïse ? Il trouve l’esclavage en pleine floraison dans le monde. Pour toutes les sociétés d’alors, l’esclavage était une condition d’existence, de prospérité nationale. L’esclave, à cette époque, formait une bonne partie de la fortune mobilière des