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Page:Simon Levy - Moïse, Jésus et Mahomet, Maisonneuve, 1887.djvu/191

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Que j’aime mieux dans cette triste supposition cette singulière comparaison arrachée au septicisme : « Ah ! certes, l’état misérable d’un chien qui est en vie est plus à envier que la » majesté d’un lion terrassé par la mort[1]. » C’est donc ou une amère dérision ou l’expression d’un sentiment vrai, que le fameux souhait formé par Balaam et proposé par Moïse à l’enseignement comme à l’édification du peuple hébreu. Nous confessons que nous avons toujours aimé à y voir le sérieux indice d’une conviction passée, dès l’époque mosaïque, à l’état de croyance générale que les âmes des justes pouvaient et devaient s’attendre, après la mort, à des félicités plus complètes encore que celles qui sont départies dans cette vie.

N’est-ce pas précisément à cause de ces félicités certaines que Moïse aussi a dit à Israël : « Vous êtes les enfants de Dieu, ne vous faites point d’incision dans la chair et ne vous arrachez pas les cheveux pour un mort, car vous êtes un peuple saint[2] » Quoi ! observe judicieusement un de nos plus célèbres théologiens, c’est l’inverse qui devrait être écrit ! « Précisément parce qu’Israël est un peuple saint, il devrait se lamenter amèrement sur la perte d’un de ses enfants ; plus il y a de noblesse, plus y a de deuil à prendre. Que penserait-on de celui qui dirait à son voisin : Oh ! ne te lamente pas pour la bague que tu as perdue, elle était ornée d’un si joli brillant ! Mais voici la vraie explication de cette parole de Moïse : Israël ! tu es un peuple d’élite, une nation sainte, c’est pourquoi ne gémis pas trop sur un frère que la mort t’enlève. Sans doute, c’est un membre distingué par ses mérites que tu perds. Mais sache qu’il ne fait que te quitter pour entrer dans un monde meilleur. Ce n’est pas un vase

  1. Ecclésiaste, ch. IX, v. 4.
  2. Deut., chap. XIV, v. 1 et 2.