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Page:Simon Levy - Moïse, Jésus et Mahomet, Maisonneuve, 1887.djvu/338

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Oh ! oui, si la religion juive peut se glorifier de quelque chose, c’est d’avoir, en tout temps, nettement saisi le point où il est nécessaire d’imposer silence à l’instinct de conservation, pour briser soi-même une existence qui n’eût pu se prolonger que grâce à une infamie, ou pour complaire seulement à une pensée trop égoïste. D’un côté, elle parle au nom du devoir, de l’autre elle offre des couronnes, heureuse dans les deux situations si elle voit ses fidèles comprendre que la vie n’est pas absolument le bonheur, mais l’instrument qui nous a été donné pour arriver au bonheur, et qu’ainsi, il peut souvent être préférable de la sacrifier que d’y rester attaché envers et contre tout. Non moins heureuse aussi de s’apercevoir qu’ils savent en estimer la valeur, et qu’ils n’iront pas follement l’exposer pour donner satisfaction à un faux point d’honneur, ni qu’ils en méconnaîtront jamais le but en la gaspillant dans d’énervantes jouissances. L’horreur du suicide, mais du suicide, dans ses applications les plus éloignées, voilà ce dont elle cherche à les pénétrer, et c’est à ce dessein qu’elle leur net constamment sous les yeux cette double maxime sur l’importance de laquelle on ne saurait assez insister, à savoir que le vice n’est rien autre chose qu’une mort volontairement anticipée[1], et que l’on est bien moins condamnable si l’on enfreint une pratique religieuse, que si l’on marche avec insouciance vers un danger où il n’y a nulle nécessité de se jeter pour le moment[2].

§ II
DEVOIRS POSITIFS ENTRE LE CORPS ET L’AME

Parmi ces devoirs, il en est d’abord un que le Judaïsme a élevé bien haut, et qui, effectivement, mérite d’être cité au

  1. Voir plus haut, p. 326.
  2. Suivant cet adage talmudique : Chamira Shanta meisoura.