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Page:Simon Levy - Moïse, Jésus et Mahomet, Maisonneuve, 1887.djvu/86

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rentes à la matière qu’elle n’a pas su totalement subjuguer, les philosophes dualistes n’ont pas fait à la liberté un meilleur sort que les poètes. Elle redevient parfaitement illusoire ; elle n’est plus qu’un mot vide de sens, une faculté dont l’exercice est impossible.

Cherchera-t-on le libre arbitre dans le Panthéisme ? De grâce, que parlez-vous de liberté à un système qui voit Dieu en tout, et qui substitue aux volontés individuelles la volonté du grand Pan ? C’est tout au plus s’il en connaît le nom, car, pour la chose, il a osé la nier avec une insolence sans pareille, en comparant l’homme qui se croit libre à une girouette capable de s’imaginer qu’elle est la cause de ses mouvements.

Ainsi, avant le Judaïsme ou en même temps que lui, on s’était bien préoccupé du redoutable problème de la Providence et de la liberté humaine. Mais le nœud avait été tranché violemment, ou plutôt, en mutilant la nature humaine par la suppression du libre arbitre, on avait réussi à faire disparaître un côté de la question. De temps en temps la conscience protestait, et c’est bien à sa voix que Platon obéissait quand, pour un instant, il affirmait la liberté humaine et essayait de la concilier avec le dogme de la Providence. Étrange illusion d’un esprit profond qui croyait faire reculer la logique devant les convictions du cœur ! En présence de l’attestation de la conscience, il eût fallu modifier les principes ; c’était l’unique, le vrai moyen de tout accorder.

Et c’est là précisément ce que le Judaïsme a su faire. En prenant l’homme tel qu’il est, le Judaïsme vit bien qu’il avait devant lui un être doué de la responsabilité morale. D’un autre côté, il ne fut pas moins convaincu qu’un Dieu sans la faculté de la prescience n’était plus un Dieu parfait. Ce furent donc d’abord ces deux vérités qu’il tint fermes ; elles avaient à ses yeux un égal caractère de certitude ; il ne consentit plus à s’en