Page:Smith - Recherches sur la nature et les causes de la richesse des nations, Blanqui, 1843, I.djvu/266

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qui résulte des lois sur les pauvres est, d’autant que je puis le savoir, particulière à l’Angleterre. Elle vient de la difficulté qu’un homme pauvre trouve à obtenir un domicile (settlement)[1], ou même la permission d’exercer son industrie dans une autre paroisse que celle à laquelle il appartient. Les lois des corporations ne gênent que la libre circulation du travail des artisans et ouvriers de manufacture seulement ; la difficulté d’obtenir un domicile gêne jusqu’à la circulation du travail de simple manœuvre. Il ne sera pas hors de propos de donner à ce sujet quelques éclaircissements sur l’origine, le progrès et l’état actuel de ce mal, l’un des plus fâcheux peut-être de l’administration de l’Angleterre.

Lors de la destruction des monastères, quand les pauvres furent privés des secours charitables de ces maisons religieuses, après quelques tentatives infructueuses pour leur soulagement, le statut de la quarante-troisième année d’Élisabeth, chapitre II, régla que chaque paroisse serait tenue de pourvoir à la subsistance de ses pauvres, et qu’il y aurait des inspecteurs des pauvres établis annuellement, lesquels, conjointement avec les marguilliers, lèveraient, par une taxe paroissiale, les sommes suffisantes pour cet objet.

Ce statut imposa à chaque paroisse l’obligation indispensable de pourvoir à la subsistance de ses pauvres. Ce fut donc une question de quelque importance, de savoir quels étaient les individus que chaque paroisse devait regarder comme ses pauvres. Après quelques variations, cette question fut enfin décidée dans les treizième et quatorzième années de Charles II, où il fut statué qu’une résidence non contestée de quarante jours ferait acquérir le domicile dans une paroisse, mais que, pendant ce terme, deux juges de paix pourraient, sur la réclamation des marguilliers ou inspecteurs des pauvres, renvoyer tout nouvel habitant à la paroisse sur laquelle il était légalement établi en dernier lieu, à moins que cet habitant ne tînt à loyer un bien de 10 livres de revenu annuel, ou bien qu’il ne fournît, pour la décharge de la paroisse où il était actuellement résident, une caution fixée par ces juges.

On dit que ce statut donna lieu à quelques fraudes, les officiers de paroisse ayant quelquefois engagé par connivence leurs propres pauvres à aller clandestinement dans une autre paroisse, et à s’y tenir

  1. Garnier traduit le mot anglais settlement, domicile, par le mot insignifiant et incompréhensible d’établissement.