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Page:Société de l’enseignement supérieur - Revue internationale de l’enseignement, volume 37, juin 1899.djvu/15

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L’UNIVERSITÉ DE PARIS SOUS PHILIPPE-AUGUSTE

L’Université n’est pas seulement créée par le fait matériel, le lien corporatif, l’association de secours mutuels établie entre les maîtres et les étudiants. On doit tenir compte du lien moral, de la communauté de sentiments, d’idées et de méthode scientifique qui unissait une grande partie de la population scolaire. Il est certain que l’école de Paris avait commencé à prendre conscience d’elle-même et de son unité intellectuelle du jour où un professeur, comme Abélard avait su grouper autour de sa chaire la jeunesse de France et d’Europe. En ce sens, l’Université de Paris était faite dès le second tiers du xiie siècle.

À un autre point de vue, la grande association, dite « Université » ne fut, elle-même, qu’une juxtaposition d’associations scolaires d’une étendue plus limitée. Au sein de la corporation générale existaient des corporations particulières : celles qui unissaient les maîtres et les écoliers appartenant à une même spécialité d’études : on les appellera, après le milieu du xiiie siècle, des Facultés ; et celles qui unissaient les maîtres et les écoliers appartenant à un même pays d’origine, les nations. La corporation générale elle-même (à Paris, du moins), paraît avoir été la résultante de deux associations moins vastes : celle des maîtres, et celle des écoliers. La question difficile et obscure entre toutes, est de savoir à quelle époque précise la corporation générale et les corporations particulières se sont formées. Il s’en faut que les travaux approfondis de certains savants, aient réussi à dissiper les obscurités et à percer le mystère. Le P. Denifle, lui même, le maître incontesté de ce domaine, n’a pu arriver qu’à des approximations. C’est que les institutions scolaires, comme tant d’autres institutions du moyen âge, ne se sont pas établies, du jour au lendemain, par la vertu d’un décret législatif, mais par une série de créations successives et de progrès graduels dont l’histoire n’a pas conservé le souvenir. Certains textes datés nous révèlent pour la première fois l’existence de corps de facultés, de nations, d’université, mais rien ne prouve que leur organisation ne soit pas antérieure de plusieurs années au plus ancien document qui les mentionne.

En France, deux populations scolaires seulement ont été qualifiées Université à l’époque de Philippe-Auguste : celles de Paris et de Montpellier.

À Paris, c’est dans un acte de 1215, émané du cardinal Robert de Courçon[1] qu’on rencontre pour la première fois les mots : Universitas magistrorum et scolarium, et c’est en 1221, dans une bulle du

  1. Chartul, Univ. Paris., I, no 20.