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Page:Société de l’enseignement supérieur - Revue internationale de l’enseignement, volume 37, juin 1899.djvu/26

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REVUE INTERNATIONALE DE L’ENSEIGNEMENT

quoi élit-on tel homme ? Il y a bien des raisons diverses à cela, mais il semble qu’il y a un besoin général d’obéissance qui cherche à se satisfaire à tout prix. Ce besoin d’obéissance a lui-même sa source dans le désir d’être protégé, qui se double d’un plaisir indéfinissable. Ce besoin de protection, né d’une différence ineffaçable, celle des forts et des faibles, n’eût pas été si vivement senti sans la famille ; c’est pourquoi l’origine du pouvoir est une origine familiale. — Mais cette origine familiale du pouvoir est insuffisante et incomplète par elle-même. L’autorité des parents, en effet, a varié ; elle a varié beaucoup moins d’après leur supériorité réelle que d’après leur supériorité supposée soit par les coutumes, soit par les mœurs ou la religion ; en sorte que l’autorité du père est assise sur une base de croyances communes et de désirs communs. Donc, tout ce qui modifiera ces croyances et ces désirs tendra à déplacer l’autorité. Dès qu’un prêtre, un guerrier, etc., sera cru plus propre que le père à satisfaire les désirs répandus dans un groupe social, c’est lui qui sera obéi et respecté avant tous. Le pouvoir se déplace donc avec les croyances ; il se déplace avec les désirs ; si de nouveaux désirs surgissent, tel qui sera plus apte à les satisfaire s’emparera du pouvoir. Et si l’on veut savoir les causes qui font surgir des désirs nouveaux et des croyances nouvelles, ce sont toujours des découvertes et des inventions.

Les partis. — Si la vie politique, comme la vie économique, comme la vie sociale tout entière, est un tissu d’imitations (les révolutions même sont imitatives), elle est aussi le théâtre d’opposition, de luttes continuelles ; ce sont, pour ne parler que des luttes intérieures, les luttes de partis. Il ne faut pas confondre une classe et un parti ; une classe est permanente. un parti temporaire. D’ailleurs, la division des partis peut être fondée sur celle des classes ; elle l’est plus souvent sur celle des corporations, ou des religions, ou des langues, ou des sentiments et des principes. Quelle est l’explication, quelle est l’origine de l’esprit de parti ? Nous avons vu que tous les faits de l’histoire ont commencé par être des questions, des questions suivies de réponses. Ces questions se sont posées d’abord dans les consciences individuelles ; mais dès que ce duel logique a pris fin en elles, il s’est imposé comme duel collectif entre les individus ; la guerre entre les hommes suppose la paix en eux. C’est donc par besoin de ne pas se contredire et de n’être pas contredit que l’homme, animal logique, crée des partis et y adhère. — Il faut encore, pour qu’il y ait parti, qu’il y ait communauté de sentiments entre gens ayant adopté la même solution. Voilà pourquoi tout ce qui agrandit les communications et tout ce qui fait l’exten-