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Page:Société de l’enseignement supérieur - Revue internationale de l’enseignement, volume 37, juin 1899.djvu/325

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UNE NAISSANCE EN ORIENT

les premières années du moins, étaient pour la plupart comme des blocs informes venus directement de la forêt ; il fallait se contenter de distinguer et de choisir ceux qu’on pourrait façonner aux programmes d’études ; au personnel enseignant ensuite de dégrossir, polir et graver dessus les éléments de la science médicale et le nom de la France. Quant à ceux qu’on ne jugeait guère susceptibles de recevoir d’autres empreintes que celles qu’ils portaient déjà, celles de la hache du bûcheron, la jeune Faculté se faisait et s’est toujours fait un devoir de les céder courtoisement à sa rivale ; entre rivaux la courtoisie est de règle.

Le programme d’études à été dès le début celui des Facultés de médecine de France, de 18843 à 1893, ancien régime ; les épreuves de fin d’études étaient contrôlées par la présence des délégués de l’instruction publique. Le diplôme délivré aux jeunes médecins, portant la signature de la France, était bien une garantie suffisante pour les populations : leurs ordonnances étaient même souvent les préférées, mais ils ne pouvaient les délivrer qu’à la dérobée. Le diplôme en effet ne donnait le droit de plein exercice que dans les colonies françaises, la France étant loin d’être dans la disette en fait de médecins. Le gouvernement ottoman se méprenant sans doute sur le sens de cette restriction et la prenant pour une réserve atteignant le savoir el la capacité du sujet, refusait absolument à celui-ci le permis d’exercer, lui refusant mème jusqu’à la maigre faveur d’aller présenter à nouveau ses cinq examens de doctorat devant la Faculté de Constantinople. Cette faveur ne fut accordée qu’en 1889 ; c’était encore bien onéreux, mais enfin on se trouvait sur le même pied que les médecins sortis de la Faculté américaine, tolérés plutôt qu’acceptés dans l’Empire ottoman.

En 1895, la Faculté adoptait le nouveau régime des études médicales en France. Cette circonstance motivait l’envoi à Beyrouth non plus d’un seul délégué de l’Instruction publique, mais d’un jury complet d’examen pour les épreuves de doctorat ; et cette fois on délivrait aux étudiants, le diplôme de plein exercice en France et dans les colonies, le diplôme d’État. Les nouveaux médecins rendus ainsi plus acceptables, furent encore moins acceptés. Le gouvernement ottoman, en effet, derrière ce diplôme d’État crut entrevoir une puissance étrangère, amie il est vrai, qui semblait vouloir se mettre un peu trop à l’aise chez lui ; et nos infortunés diplômés, comme jouant de malheur, ne furent plus même tolérés et menacés d’avoir la police ottomane pour premiers clients.

Cette violente secousse a soumis la vitalité de la Faculté à une rude épreuve ; elle semblait l’incliner vers la chute ; heureusement