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Page:Sophocle (tradcution Masqueray), Tome 2.djvu/123

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NOTICE

Le Philoctète a été joué en 409. Plus heureux cette année-là qu’avec son Œdipe-Roi, Sophocle obtint la première place au concours[1]. Nous ignorons quels autres drames il fit représenter avec cette tragédie, mais nous ne pouvons qu’approuver la décision de ses juges. Le Philoctète où les personnages principaux, au nombre de trois seulement, sont opposés les uns aux autres avec tant de précision et de force, où les revirements d’une action à la fois si simple et si pleine résultent uniquement de l’opposition naturelle de leurs caractères, est une de ces pièces heureuses qu’on relit toujours avec plaisir[2]. On dirait, tant elle est adroite et facile, tant les personnages ont de vivacité dans leurs impressions et de vie dans leur allure, qu’elle est l’œuvre d’un homme jeune : pourtant, en 409, Sophocle était plus qu’octogénaire. Et ce ne fut pas sa dernière œuvre.

La légende de Philoctète est connue. On en trouve les principaux éléments dans l’Iliade, dans l’Odyssée, dans les Cypriaques, dans la Petite Iliade. A ces quatre poèmes il faut aussi ajouter le témoignage des mythographes. De plus, Eschyle et Euripide, — ce dernier en 431[3] vingt

  1. Le Philoctète est précédé dans L, p. 79 b de deux ὑποθέσεις, l’une en hexamètres que le copiste au début a transcrits comme de la prose, l’autre d’origine alexandrine. Elle se termine par l’indication précieuse : έδιδάχθη έπἱ Γλαυκίππου (ol. 92, 3 = 410/9)) πρῶτος ἦν Σοφοκλῆς.
  2. Fénelon, on le sait, en a traduit dans son Télémaque les principaux passages, mais comme Philoctète fait lui-même au fils d’Ulysse le récit de ses aventures, il les a beaucoup abrégées. Le ton de la traduction est presque toujours très juste, et ce n’est que par exception qu’après son abandon Philoctète, à son réveil, « voit les vaisseaux fendre les ondes », alors que dans le texte grec, v. 279 sq., leur allure est beaucoup plus simple : ce qui ne diminue pas le désespoir du malheureux.
  3. Voir l’Argument d’Aristophane de Byzance en tête de la Médée.