Le Coryphée. — Pour moi, depuis longtemps déjà je serais retourné auprès de mon vaisseau, si nous n’apercevions pas Ulysse s’approcher et le fils d’Achille se diriger ici vers nous.
Ulysse. — Tu ne pourrais pas me dire pourquoi encore une fois tu reviens ainsi sur tes pas avec cette ardeur, cette hâte ?
Néoptolème. — C’est pour réparer la faute que j’ai commise tout à l’heure.
Ulysse. — Étonnante parole ! Et ta faute, quelle est-elle ?
Néoptolème. — Celle que par obéissance pour toi et pour toute l’armée…
Ulysse. — Quel acte as-tu bien pu faire qui ne soit pas digne de toi ?
Néoptolème. — Par tromperie honteuse et par ruse je me suis emparé de quelqu’un.
Ulysse. — De qui ? Ciel ! Est-ce que tu médites un projet nouveau ?
Néoptolème. — Aucun, mais au fils de Pœas…
Ulysse. — Que comptes-tu faire ? Comme la crainte me saisit !
Néoptolème. — A qui j’ai pris cet arc, je veux au contraire…
Ulysse. — Zeus, que vas-tu dire ? Tu ne songes pas à le rendre ?
Néoptolème. — Si, puisque c’est par une honteuse injustice que je le lui ai pris.
Ulysse. — Par les dieux, dis-tu cela pour plaisanter ?
Néoptolème. — Oui, si c’est plaisanter que de dire la vérité.
Ulysse. — Eh quoi, fils d’Achille, quelle parole as-tu prononcée ?
Néoptolème. — Veux-tu que je te répète deux et trois fois la même chose ?