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Page:Sophocle (tradcution Masqueray), Tome 2.djvu/278

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Pressé, vif, inquiet.

Un Choreute.Oh ! es-tu né avec des yeux aveugles ? Tu es malheureux et chargé d’années, autant que f en puis juger.

Un autre Choreute.Mais pour ce qui dépend de moi, tu n’ajouteras pas ces malédictions à ton malheur.

Le Coryphée.En effet, tu vas trop loin, trop loin ; pour ne pas t’avancer imprudemment sous la verdure de ce bois silencieux, où à l’eau d’un cratère s’unissent des libations de miel[1], — garde-toi d’y toucher, étranger de malheur, — recule, éloigne-toi. Un grand espace nous sépare : entends-tu, infortuné vagabond ? Si tu as quelque chose à dire à notre troupe, sors de ce lieu interdit, et à l’endroit où chacun peut parler, explique-toi. Auparavant, pas un mot.

Œdipe, toujours dans le bois des Euménides, paraît hésiter.
Mélodrame.

Œdipe. — Ma fille, à quel parti faut-il s’arrêter ?

Antigone. — Mon père, on est forcé de pratiquer les mêmes coutumes que les gens du pays, en cédant, en obéissant, quand cela est nécessaire[2].

Œdipe. — Alors, donne-moi la main.

Antigone. — La voici, prends-la.

Œdipe.(Aux Coloniates.) Étrangers, ne me faites pas de mal ; (au Coryphée) j’ai confiance en toi, je change de place[3].

Le Coryphée. — Jamais personne ne t’emmènera, vieillard, malgré toi de ces lieux-ci.

  1. Il s’agit des Euménides auxquelles on n’offrait pas de vin. Cf. 481.
  2. Elle lui rappelle judicieusement ce qu’il a dit lui-même, v. 12 sq., et le chœur va le lui répéter, v. 184 sqq., avec plus de rudesse.
  3. En parlant au chœur Œdipe emploie d’abord le pluriel, puis le singulier, et je suppose qu’il en est ainsi parce qu’il s’adresse