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Page:Sophocle (tradcution Masqueray), Tome 2.djvu/290

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à toi sacré, innocent, et j’apporte un grand bienfait aux habitants de ce pays. Quand sera ici présent le maître, qui est votre guide, alors tu apprendras, tu sauras tout. Jusque-là ne trahis pas ta promesse.

Le Coryphée. — Respecter, vieillard, tes exhortations, c’est une nécessité pressante pour moi, car elles n’ont pas été formulées en paroles légères, mais j’aime autant que ce soient ceux qui commandent ici qui prennent cette décision.

Œdipe. — Et où est-il, celui qui règne sur ce pays, étrangers ?

Le Coryphée. — Il habite la cité où son père était roi. Le messager qui m’a fait venir ici est allé le chercher.

Œdipe. — Croyez-vous qu’il aura quelque égard, qu’il se souciera assez de l’aveugle, pour venir en personne ?

Le Coryphée. — Assurément, quand il aura appris ton nom.

Œdipe. — Et quel est celui qui ira le lui annoncer ?

Le Coryphée. — La route est longue, mais souvent les propos des voyageurs aiment à se répandre au loin[1] et quand il les entendra, sois-en sûr, il viendra. Ton nom, vieillard, est dans toutes les bouches, tous le connaissent, et bien qu’appesanti par l’âge, en entendant parler de toi, le roi arrivera ici rapidement.

Œdipe. — Ah ! qu’il arrive pour le bonheur de son pays et pour le mien propre : n’a-t’on pas, en effet, raison de penser à soi-même ?

A ce moment apparaît au loin, à gauche, une femme sur une monture.

Antigone. — Zeus, que dire, que penser, père ?

Œdipe. — Qu’y a-t-il, Antigone, mon enfant ?

Antigone. — J’aperçois une femme ; elle se dirige vers

  1. De l’endroit où est censée se jouer la pièce jusqu’au Dipylon la distance est d’environ deux kilomètres : n’oublions pas que ce sont des vieillards qui parlent. Œdipe a déjà rencontré un passant. D’autres gens se rendant à Athènes ont suivi la même route ; ils ont appris qu’Œdipe était dans le voisinage et ils en ont aussitôt