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Page:Sophocle (tradcution Masqueray), Tome 2.djvu/320

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Thésée. — De mon côté n’aie pas d’inquiétude : jamais je ne te trahirai.

Œdipe. — Je ne te lierai pas par un serment, comme un homme perfide[1].

Thésée. — Cela ne te donnerait rien de plus que ma parole.

Œdipe. — Comment donc feras-tu ?

Thésée. — Qu’appréhendes-tu surtout ?

Œdipe. — Il viendra des hommes…

Thésée. — Ceux-ci y veilleront.

Œdipe. — Prends garde en me laissant…

Thésée. — Ne m’instruis pas de ce que je dois faire.

Œdipe. — Dans ma peur j’y suis contraint.

Thésée. — Mais mon cœur, à moi, n’a pas peur.

Œdipe. — Tu ne sais pas les menaces…

Thésée. — Je sais que personne ne t’emmènera d’ici malgré moi. Dans la colère on multiplie les menaces, les phrases vaines, mais quand l’esprit redevient maître de lui-même, ces menaces s’envolent. Ceux qui ont eu le front de prononcer de terribles paroles, en disant qu’ils t’emmèneraient, pourraient bien, je crois, trouver jusqu’ici une mer large et peu tranquille. Rassure-toi donc, je t’y engage, quand bien même je n’aurais pas résolu de te défendre, puisque c’est Phœbos qui t’envoie. D’ailleurs, même pendant mon absence, mon nom, j’en suis certain, te préservera de toute insulte.

Il sort.
Puissant et doux.

Le Chœur.Le pays aux beaux chevaux dans lequel tu es arrivé, étranger, séjour qui n’a pas d’égal sur la terre,

  1. Cf. Phil. 811. — Médée n’a pas la même confiance en Égée : elle lui dicte un serment que celui-ci répète, (Médée, 746 sqq.) mais, après la trahison de Jason, cette femme a des raisons particulières de se méfier de la parole des hommes.