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Page:Sophocle (tradcution Masqueray), Tome 2.djvu/50

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résolu de te révéler, maîtresse, tout ce que le hasard m’a fait apprendre par Lichas. Et cela, une foule de gens de Trachis l’ont entendu comme moi, en pleine agora ; aussi, ils peuvent le confondre. Si je te fais de la peine, je le regrette, mais pourtant j’ai dit la vérité.

Déjanire. — (Accablée.) Ah ! que je suis malheureuse ! Dans quelle situation me voici ? Quel fléau j’ai accueilli sous mon toit, sans le savoir ! Infortunée que je suis ! Est-ce ainsi que cette femme était inconnue, comme le jurait celui qui la conduisait ?

Le Messager. — Eh ! oui ! sa beauté est éclatante, sa naissance aussi. Fille d’Eurytos, précédemment on l’appelait Iole, mais sur son origine Lichas ne pouvait rien dire, puisqu’il ne posait jamais une question[1].

Le Coryphée. — Périssent, je ne dis pas tous les êtres malhonnêtes, mais celui qui en secret s’abaisse à commettre un acte malhonnête !

Déjanire. — Que faut-il faire, femmes[2] ? Je me sens toute étourdie par ce que je viens d’entendre.

Le Coryphée. — Va questionner Lichas : peut-être parlerait-il clairement, si tu consentais à l’interroger de force.

Déjanire. — C’est cela, j’irai ; ce que tu dis est plein de sens.

Le Messager. — Et nous, faut-il que nous restions ici ? Que dois-je faire ?

Déjanire. — Reste, le voici. Sans être appelé par mes serviteurs, il vient tout seul et sort du palais.

Entre Lichas.

Lichas. — Que faut-il dire à Héraclès, femme, quand je

  1. Allusion sarcastique à ce que Lichas a dit plus haut, v. 317, de sa discrétion.
  2. Déjanire demande conseil aussi bien aux jeunes filles qui composent le chœur, qu’à ses propres femmes. De là l’emploi du mot γυναῖκεσ, qui ne peut convenir au chœur seul, bien que ce soit le coryphée qui réponde.