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Page:Sophocle - Œdipe Roi, trad. Bécart, 1845.djvu/102

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PHORBAS.
Oui, seigneur, au palais je fus même adopté :

On ne m’y traitait point en esclave acheté.

ŒDIPE.
Quels étaient tes travaux ?


PHORBAS.
Presque toute ma vie

Par les soins du bétail, seigneur, était remplie.

ŒDIPE.
Dans quels lieux faisais-tu pâturer tes troupeaux ?


PHORBAS.
Sur le mont Cithéron, sur ses riants côteaux.


ŒDIPE.
Reconnais-tu cet homme à la mine étrangère ?

L’aurais-tu jamais vu ? Parle-moi sans mystère[1] ?

PHORBAS.
Qui ?... Qu’a-t-il fait ?... De qui me parlez-vous, seigneur ?


ŒDIPE.
De l’homme que voici. Vis-tu jamais ailleurs

Ce mortel ?
 

PHORBAS.
Pas assez pour que je me rappelle

Ses traits, pour en avoir un souvenir fidèle.

LE BERGER.
Prince, ce fait ne doit en rien vous étonner ;

De m’avoir vu, bientôt il va se rappeler ;
Sa mémoire ne peut avoir perdu l’idée
Des trois belles saisons que dans plus d’une année

  1. Te souviens-tu d’avoir vu cet homme, l’ayant connu ? L’expression française répond à celle du texte, qui offre d’abord un peu d’embarras. Il s’agit ici de certaine connaissance intime (οἲδα, novi) qui tient à la conscience, quoiqu’elle puisse pendant quelque temps échapper à la mémoire.