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Page:Sophocle - Œdipe Roi, trad. Bécart, 1845.djvu/40

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Tout le peuple languit,
Il succombe, il périt ;
Le mal est sans ressource,
De ce fléau la source
Est mystère pour tous,
Mais des dieux le courroux
Rend nos femmes stériles
Et nos enfants débiles ;
Les fruits sont desséchés,
Dans leur germe étouffés.
Un Dieu plus prompt que n’est l’oiseau rapide,
Feu dévorant, une peste homicide[1]
A décimé la ville et conduit au tombeau
Des milliers d’habitants victimes du fléau.
Les morts, ô sort affreux ! laissés sans sépulture,
Des oiseaux dévorants sont l’indigne pâture[2].
La jeune épouse ici se lamente et gémit,
La mère par ses pleurs plus loin nous attendrit.
Aux pieds de nos autels tout le peuple s’assemble,
Pour la fin de leurs maux priant les dieux ensemble.
Fille de Jupiter,
Ah ! du haut de l’Éther,
Entends leur voix touchante !
Divinité puissante,
Secoure les mortels !
Que ces fléaux cruels
Disparaissent du monde !
Que cette peste immonde,
Ce Mars sans bouclier[3],

  1. Un dieu de feu, a dit déjà Sophocle πυρφόρος θεός : du vers 27 ; il le nomme ici plus loin, c’est la peste même.
  2. Vers traduits à peu près de même dans la Henriade.
  3. Ce Mars sans bouclier, ce nouveau Mars, est mis ici pour le mal personnifié et non pas seulement pour le fléau de la guerre. Aussi n’apparaît-il point ici comme dans les combats, tout armé, mais sans bouclier, entouré de cris ou de plaintes.