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Page:Sophocle - Tragédies, trad. Artaud, 1859.djvu/15

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plus près du texte : « Moi aussi, quand j’étais jeune, j’avais la langue paresseuse, et le bras prompt à agir. »

Il est une tentation assez fréquente, à laquelle le traducteur est forcé de résister, c’est d’adoucir quelques nuances trop heurtées, d’atténuer la brutalité de certains sentiments qui choquent nos habitudes et nos idées modernes. Il doit se tenir en garde contre ce penchant, sous peine de substituer une image de convention à une image fidèle. Il n’est pas chargé de corriger son auteur, et de le rendre irréprochable, ni de le travestir à la mode changeante des convenances locales. À la vérité, cette exactitude scrupuleuse qu’on exige aujourd’hui, impose une tâche délicate, et quelquefois très difficile. On conçoit que la plume hésite, par exemple, dans ce passage de l’Antigone, où le poète raconte qu’Hémon crache au visage de son père ; ou ailleurs, lorsque Électre, à propos des clameurs de Clytemnestre, dit qu’elle aboie. En pareils cas, nous reproduisons dans les notes la crudité du texte, que la susceptibilité du goût français nous a forcé d’adoucir.

D’un autre côté, il est un écueil en sens contraire, qui ne paraît pas moins à craindre. Prenons garde de murer l’esprit du poète, à force d’exactitude littérale. Parfois il est nécessaire d’expliquer, de compléter ce