Page:Sorel - Réflexions sur la violence.djvu/77

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patriote, tantôt il déclame contre l’armée. Aucune contradiction ne l’arrête, — l’expérience ayant démontré que l’on peut, au cours d’une campagne électorale, grouper des forces qui devraient être normalement antagonistes d’après les conceptions marxistes. D’ailleurs un député ne peut-il pas rendre des services à des électeurs de toute situation économique ?

Le terme « prolétaire » finit par devenir synonyme d’opprimé ; et il y a des opprimés dans toutes les classes[1] : les socialistes allemands ont pris un extrême intérêt aux aventures de la princesse de Cobourg[2]. Un de nos réformistes les plus distingués, Henri Turot, longtemps rédacteur de la petite république[3] et conseiller municipal de Paris, a écrit un livre sur les « prolétaires de l’amour » ; il désigne ainsi les prostituées de bas étage. Si quelque jour l’on donne le droit de suffrage

    affiches particulières pour la ville et d’autres pour la campagne.

  1. Gênés par le monopole des agents de change, les coulissiers de la Bourse sont ainsi des prolétaires financiers, et parmi eux se rencontre plus d’un socialiste admirateur de Jaurès.
  2. Le député socialiste Sudekum, l’homme le plus élégant de Berlin, a joué un grand rôle dans l’enlèvement de la princesse de Cobourg ; espérons qu’il n’a pas d’intérêts financiers dans cette affaire. Il représentait alors à Berlin le journal de Jaurès.
  3. M. Turot a été assez longtemps rédacteur au journal nationaliste l’Éclair, en même temps qu’à la Petite République. Lorsque Judel a pris la direction de l’Éclair, il a remercié son collaborateur socialiste.