jour, mais souvent une gloire en feu de Bengale : « ce lyrique est aussi un bouffon… Cela tient du boniment, de la charge d’atelier, de la parodie et de la caricature[1] ». Catulle Mendès, qui le met pourtant très haut, imagine une fête devant le monument de Banville au Luxembourg, et c’est une scène de Mardi-Gras[2] ! Enfin, son meilleur ami, Stéphane Mallarmé, admire, d’une façon compliquée, « la nécessité d’un rôle vierge et jusque maintenant inconnu » ; une sorte de fatalité veut donc « que l’auteur des Améthystes représente à travers les somptuosités, les ingénuités…, l’être de joie et de pierreries qui brille, domine, effleure[3] ». Le mot de la charade, c’est bien : clown.
Quant aux critiques qui écrivent pour être compris, leur attitude est nette. Jules Lemaître constate chez Banville l’intention persévérante de ne vivre que de mots, de n’exprimer aucune idée[4]. M. Lalou dit sèchement que son œuvre est une improvisation, clownesque[5]. Barbey d’Aurevilly, plus indulgent, trouve cette jolie image : « de tels prestiges par les mots…, cette espèce d’harmonica littéraire joué sur des verres… à moitié vides ou tout à fait vides, ne peuvent pas constituer cette chose douce et puissante, intimement puissante, qui s’appelle un livre de poésie pour les esprits mâles et bien faits[6] ». En’effet, aux acrobaties de rimes, que nous avons vues tout à l’heure, il faut ajouter ses clowneries de pensée, qui sont une chute plus grave. Il s’est amusé à mettre en prose les fables de La Fontaine[7] ! Il s’est complu au genre de la parodie, c’est-à-dire à la plaisanterie la plus dégradante que puisse faire un poète à un autre poète[8]. Il a osé parodier jusqu’à la Tristesse d’Olympio, ce qui est bien léger pour un hugolâtre[9]. Il fait semblant de s’excuser d’avoir écrit Les Folies Nouvelles, pour l’inauguration du Théâtre d’Hervé : « c’est de cet œuf que devait sortir l’opérette, dont l’abominable race a pullulé, envahi le monde ; si bien que je me trouve, ô remords ! avoir été en quelque sorte complice de ce monstre auquel mes vers ont souhaité la bienvenue. Ce que c’est
- ↑ Rapport, pp. 301-304.
- ↑ Rapport, pp. 94-95.
- ↑ Divagations, p. 122.
- ↑ Revue Bleue du 21 février 1885, p. 232 sqq., ou Contemporains, Ire série.
- ↑ Lalou, Histoire de la Littérature, p. 8.
- ↑ Poésie et Poètes, p. 79.
- ↑ Dames et Demoiselles, p. 248.
- ↑ Odes funambulesques, p. 96, 117 ; cf. le commentaire, pp. 198-199.
- ↑ Occidentales, pp. 265-266.