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LE PARNASSE

en fut, dit Verlaine, il est reluctant[1] ». Mais de temps en temps, du fond de cette réserve sortent des œuvres fines, en progrès sensible d’un Parnasse à l’autre. Les sept sonnets de l’édition de 1866 sont curieux, sans plus, avec une note qui ressemble étrangement à celle de Coppée. N’est-ce pas une « intimité », et fort sensuelle, ce Paysage qui finit sur un joli tercet ?


Et dans l’ombre où veillait la lampe en porcelaine
S’ouvraient à la chaleur tiède de mon haleine
Tes froids regards pareils aux larges fleurs des eaux.


Voici encore, avant les Poèmes Modernes de Coppée, et dans le même ton, un croquis de la banlieue parisienne vue à travers une arche de pont :


Le froid soleil d’hiver, qui ne fait rien éclore
Glisse sur les coteaux dans sa pourpre incolore,
Comme un hôte ennuyé prompt à gagner le seuil.

Mais la tonnelle semble attendre sur la berge,
Et j’entends clairement pétiller dans l’auberge
La friture dorée et le vin d’Argenteuil[2].


Mérat se maintient au Parnasse de 1869, et donne toute sa valeur dans celui de 1876. Sa pièce, Le Matin, est juste, spirituelle, avec, tout au plus, une note un peu trop réaliste : musa pedestris ; c’est bien la Muse qui marche coquettement dans les rues de Paris, dépliant par instants le bout de ses ailes, et qui bondit de joie quand elle arrive aux confins de la campagne parisienne :


I


Quand je monte vers la barrière,
En laissant la ville en arrière,
Quand la rue est près de finir,
Un mirage, un décor, un rêve
Au bout de mon chemin se lève :
Voyez les collines bleuir !

II


Je vous connais : Vous êtes Sèvres ;
Vous avez des noms doux aux lèvres,
Et des sourires tentateurs.
Vous êtes Meudon ; vous, Asnières,
Et vous faites bien des manières
Pour de si petites hauteurs.


  1. Œuvres, IV, 286.
  2. Parnasse, p. 205. J’ai corrigé la rime du premier vers du second tercet : le texte porte
    une faute d’impression, la grêve.