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Page:Souvenirs d'enfance de Sophie Kovalewsky.djvu/285

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sophie kovalewsky.

leur première jeunesse, avec toutes les chances en leur faveur, jusqu’au moment décisif de leur vie. L’un des romans montrerait alors les conséquences du choix qu’elles avaient fait ; l’autre, « ce qui aurait pu être » si leur choix avait été contraire.

« Qui n’a pas un faux pas à regretter dans sa vie ! était le raisonnement de Sophie ; et qui n’a plus d’une fois souhaité de pouvoir la recommencer ! C’est ce désir, ce rêve, que je voudrais réaliser dans un roman, si j’étais capable de l’écrire. »

Elle ne croyait pas alors posséder ce talent, et quand elle revint à Stockholm, toute pleine de son idée, elle chercha à me persuader d’écrire ce roman en collaboration avec elle.

Je commençais précisément un nouveau roman intitulé : « En dehors du mariage ». Ce devait être l’histoire des vieilles filles — de celles qui n’ont jamais eu l’occasion de fonder elles-mêmes une famille, — de leurs idées sur le mariage et sur l’amour, des intérêts et des aspirations dont elles remplissent leur vie, en un mot le roman des femmes qui, aux yeux du monde, n’en ont pas. Je comptais faire une sorte de pendant au roman de Garborg, Mandfolk (Le monde des hommes), où il décrit comment, dans notre société, vivent les célibataires, et décrire de mon côté comment vivent les femmes non mariées, mes contemporaines. J’avais amassé de nombreux types, et m’intéressais beaucoup à ce projet.

Mais voilà Sophie et son idée arrivées, et si grande