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Page:Souvenirs d'enfance de Sophie Kovalewsky.djvu/40

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fékloucha.

soupçonné, et la découverte du voleur fut un grand soulagement.

Cependant Fékloucha n’avouait toujours pas. Niania fit plusieurs visites à sa prisonnière dans le courant de la journée, mais celle-ci répétait la même chose : « Je n’ai rien volé. Dieu punira Marie Vassiliévna de calomnier une orpheline. »

Maman entra vers le soir dans notre chambre.

« N’êtes-vous pas trop sévère pour cette malheureuse petite, Niania ? comment pouvez-vous la laisser ainsi toute la journée sans nourriture ? » dit-elle d’une voix inquiète.

Mais Niania ne voulait pas qu’on lui parlât de pitié.

« Y pensez-vous, madame ? Avoir pitié d’une fille semblable ? Mais la misérable a presque fait soupçonner d’honnêtes gens ! » dit-elle avec une telle assurance, que maman n’eut pas le courage d’insister, et s’en retourna sans avoir obtenu le moindre adoucissement au sort de la pauvre petite criminelle.

Le jour suivant, Fékloucha n’avouait toujours pas. Ses juges commençaient à s’émouvoir, lorsque tout à coup, vers l’heure du dîner, Niania entra d’un air triomphant dans la chambre de ma mère.

« Notre oiseau a tout avoué ! dit-elle rayonnante.

— Eh bien ? où sont les objets volés ? demanda naturellement ma mère.

— Elle ne le confesse pas encore, la vaurienne ! répondit Niania d’une voix préoccupée. Elle dit toutes sortes de bêtises. Elle prétend qu’elle a oublié.