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CORNEILLE
C’est après quarante ans que tu t’en aperçois ?
JOORIS, sérieusement,
On comprend ça, vois-tu, quand on rentre chez soi…
Être chez soi ! Bien à l’abri, bien à son aise !…
(Voyant le sourire de Corneille)
Quand on a voyagé comme toi, sur sa chaise,
N’ayant pour horizon que les murs qui l’entourent.
On n’imagine pas ce que c’est : le retour !
CORNEILLE
Bah !
JOORIS
Émouvante ! On revient de Gênes, de Venise,
N’importe ; on a longé pendant longtemps des côtes
Monotones de roches sauvages et hautes ;
Espagne, Portugal ou falaises de France,
On les regarde avec la même indifférence,
Tu comprends ; c’est fort laid d’ailleurs !… Mais, un matin,
Le sol s’abaisse ; on ne voit plus, dans le lointain,
Qu’une eau pâle entourant des dunes en îlots,
Et le ciel tout entier qui repose sur l’eau.