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Page:Spenlé - Novalis.djvu/11

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AVANT-PROPOS

cours de cette étude, avec des tendances similaires qui se faisaient jour en Allemagne dans d’autres groupements, plus ou moins occultes, particulièrement dans certaines sectes mystiques de la Franc-Maçonnerie. Alors même que, dans l’absence de documents précis, un certain nombre de ces rapprochements paraîtraient trop conjecturaux, ils se justifieront pourtant, croyons-nous, par le jour tout nouveau qu’ils projettent sur le mouvement général des idées pendant cette période.

La critique allemande est, pour tout ce qui touche à l’histoire du romantisme, encore encombrée de partis-pris. Les passions religieuses sont loin d’être éteintes en Allemagne et, même en littérature, elles ont souvent faussé le jugement des meilleurs historiens. Particulièrement l’œuvre de Novalis a soulevé les controverses les plus passionnées et il est rare qu’en traitant de cet auteur les critiques ne se soient cru obligés de prendre parti sur un certain nombre de questions religieuses. Selon leurs postulats individuels ils ont de préférence mis en valeur quelques aspects particuliers de l’œuvre, à l’exclusion des autres. Ainsi les critiques catholiques, s’appuyant sur une publication incomplète, intentionnellement tronquée, du pamphlet religieux « Europa ou la chrétienté », se sont attachés surtout à faire du jeune poète un précurseur du romantisme catholique en Allemagne. Ils ont été ainsi amenés à glisser souvent dans le texte des intentions que l’auteur n’y avait certainement pas mises. — Non moins exclusif et intolérant a été le zèle de la plupart des critiques protestants. S’autorisant des procédés tout-à-fait arbitraires dont avait usé Tieck, dans la publication des œuvres de Novalis, et s’appuyant sur quelques assertions inexactes par lesquelles cet éditeur posthume s’efforçait de justifier son exclusivisme capricieux, ils ont jeté le discrédit sur toute une partie de l’œuvre du poète romantique, — sur celle qui peut-être reflétait quelques-uns des symptômes les plus originaux de l’époque. — De pareils procédés, qui sans doute simplifient le travail