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Page:Staël - Delphine,Garnier,1869.djvu/175

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DELPHINE.

LETTRE X. — RÉPONSE DE LÉONCE À MADAME DE VERNON.

Je n’ai rien à dire à madame d’Albémar, madame, qui pût motiver l’entretien que vous me demandez. Nous sommes et nous resterons parfaitement étrangers l’un à l’autre : l’amitié comme l’amour doivent être fondés sur l’estime, et quand je suis forcé d’y renoncer, dispensez-moi de le déclarer.

LETTRE XI. — LÉONCE À M. BARTON.
Paris, ce 14 août.

Je l’ai offensée, mortellement offensée, mon ami ; je le voulais, et néanmoins je m’en repens avec amertume : mais aussi comment se peut-il que le jour même où j’apprends par hasard de madame de Vernon que madame d’Albémar doit aller chez le peintre de M. de Serbellane, le jour où je la vois emporter ce portrait avec elle, madame de Vernon me propose de rencontrer chez elle madame d’Albémar, de lui dire adieu, lorsqu’elle part pour rejoindre M. de Serbellane ! Et de quels termes madame de Vernon, inspirée sans doute par madame d’Albémar, se sert-elle pour, m’y engager ! elle me rappelle l’amitié, les liens de famille qui doivent me rapprocher de sa nièce ! Non, je ne suis ni le parent ni l’ami de Delphine ; je la hais ou je l’adore, mais rien ne sera simple entre nous, rien ne se passera selon les règles communes. Il est vrai, je ne devais pas me servir d’expressions blessantes en refusant de la voir ; tant de circonstances cependant s’étaient réunies pour m’irriter ! Je fus tout le jour assez content de moi-même ; mais la nuit, mais le lendemain qui suivit, je ne pus me défendre du remords d’avoir outragé celle que j’ai si tendrement aimée. J’allai chez madame de Vernon pour la conjurer de ne pas montrer ma réponse à madame d’Albémar. Madame de Vernon était partie pour la campagne de madame de Lebensei. Il n’y avait pas une heure, me dit-on qu’elle était en route. J’eus l’espoir, en montant à cheval, de la rejoindre, et je partis à l’instant ; j’arrive à Cernay sans rencontrer madame de Vernon : un de mes gens me précède ; on ouvre la grille, j’entre, et j’aperçois d’abord la voiture de madame d’Albémar, qui était avancée devant la porte de l’intérieur de la maison. J’imaginai que madame d’Albémar était au mo-