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Page:Stanley - Comment j'ai retrouvé Livingstone, trad Loreau, 1884.djvu/254

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profondeur ? Pas du tout, cher camarade ; la géographie n’est pour moi que tout à fait secondaire. J’ai l’ordre de trouver Livingstone ! Oui, mon pauvre Shaw, c’est pour le trouver que je suis ici, pour le trouver que nous nous remettrons en marche. Vous comprenez toute l’importance de cette mission. Et ne voyez-vous pas la récompense que vous donnera M. Bennett pour l’aide que vous m’aurez prêtée ? Si vous venez à New-York, vous ne manquerez jamais, j’en suis certain, d’un billet de cinquante dollars. Allons ! secouez-vous un peu ; n’ayez pas cet air morne ; allez et venez ; moquez-vous de la fièvre ; je vous garantis contre elle ; j’ai de la quinine pour tout un régiment. »

Bah ! comme si j’avais parlé à une momie. Ses yeux ont repris un peu d’éclat ; mais l’affaire d’un instant ; une minute après la lueur avait disparu, le regard était mort.

Je suis resté confondu ; puis, voulant le voir revivre, j’ai fait un punch d’une force à lui incendier les veines. « Buvez-moi cela, cher camarade ; j’y ai mis du sucre et des œufs, du citron et des épices. Buvez cela, mon pauvre Shaw, et oubliez toutes vos misères. Voyons ! ne me soufflez pas à la face comme si vous alliez mourir. Trêve à cette pantomime. Vous n’êtes pas malade, mon cher ; c’est l’ennui qui vous tient. Regardez Sélim : je parie tout ce qu’on veut qu’il ne mourra pas. Je le ramènerai sain et sauf à Jérusalem ; et vous aussi, je vous reconduirai chez vous, si vous me laissez faire. »

Pouff ! pouff ! de sa vilaine pipe. Entendez-le respirer, vous croyez qu’il va mourir ; il n’est même pas malade. Il m’a dit l’autre jour qu’il savait toutes les ruses qu’emploient les matelots pour éluder le service. Je suis persuadé qu’il me joue un de ses tours. La fièvre le dévore, dit-il. La fièvre ! j’en connais toutes les phases ; et je suis persuadé qu’il ne l’a pas. Si je prenais un bâton, je suis sûr que je le guérirais tout de suite..

Ier septembre. D’après Thani ben Abdallah, que je suis allé voir aujourd’hui à Maroro, Tabora n’a perdu que trois tembés ; ce sont les huttes des indigènes qui ont alimenté les flammes ; plus d’une centaine de cases ont été détruites. Les Arabes ont à regretter cinq des leurs, treize Vouangouana et huit esclaves. On leur a pris en outre deux cent quatre-vingts dents d’éléphant et soixante têtes de gros bétail. Les pertes de Mirambo s’élèvent à deux cents hommes.

3 septembre. Reçu de Zanzibar un paquet de lettres et des journaux que m’envoie le capitaine Webb. La belle et bonne chose