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Page:Stendhal - De l’amour, II, 1927, éd. Martineau.djvu/33

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CHAPITRE XLV

De l’Angleterre.


J’ai beaucoup vécu ces temps derniers avec les danseuses du théâtre Del Sol, à Valence. L’on m’assure que plusieurs sont fort chastes ; c’est que leur métier est trop fatigant. Vigano leur fait répéter son ballet de la Juive de Tolède tous les jours, de dix heures du matin à quatre, et de minuit à trois heures du matin ; outre cela, il faut qu’elles dansent chaque soir dans les deux ballets.

Cela me rappelle Rousseau qui prescrit de faire beaucoup marcher Émile. Je pensais ce soir, à minuit, en me promenant au frais sur le bord de la mer, avec les petites danseuses, d’abord que cette volupté surhumaine de la fraîcheur de la brise de mer sous le ciel de Valence en présence de ces étoiles resplendissantes qui semblent tout près de vous, est inconnue à nos tristes pays brumeux. Cela seul vaut les quatre cents lieues à faire, cela aussi empêche de penser à force de sensations. Je pensais que la chasteté de mes petites danseuses ex-