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Page:Stendhal - De l’amour, II, 1927, éd. Martineau.djvu/333

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DE L’AMOUR

corriger maintenant, tout m’est possible. »

Elle se releva pour relire les billets vingt fois. Le second surtout la jeta dans des transports de bonheur. Bientôt elle remarqua une vérité établie dans son cœur depuis fort longtemps : c’est que jamais elle n’aurait pu s’attacher à un homme de moins de quarante ans. (L’inconnu parlait de son âge). Elle se souvint qu’à l’église, comme il était un peu chauve, il lui avait paru avoir trente-quatre ou trente-cinq ans. Mais elle ne pouvait être sûre de cette idée ; elle avait si peu osé le regarder et elle était si troublée ! Durant la nuit, Ernestine ne ferma pas l’œil. De sa vie, elle n’avait eu l’idée d’un semblable bonheur. Elle se releva pour écrire en anglais sur son livre d’heures : « N’être jamais impérieuse. Je fais ce vœu le 30 septembre 18… »

Pendant cette nuit, elle se décida de plus en plus sur cette vérité : il est impossible d’aimer un homme qui n’a pas quarante ans. À force de rêver aux bonnes qualités de son inconnu, il lui vint dans l’idée qu’outre l’avantage d’avoir quarante ans, il avait probablement encore celui d’être pauvre. Il était mis d’une manière si simple à l’église, que sans doute il était pauvre. Rien ne peut égaler sa joie à cette découverte. « Il n’aura jamais