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DE L’AMOUR

de vieux imbéciles qui passent pour avoir été des gens d’esprit autrefois, et de pauvres diables qui n’ont pas de dîner chez eux. Elle parle avec admiration de lord Byron, de Canaris, de Bolivar, de M. de la Fayette. On la plaint, dans son petit monde, comme une jeune femme bien malheureuse, et on la loue comme une personne infiniment sensible et spirituelle ; elle est passablement contente de la sorte. Cela fait une de ces maisons bourgeoises que vous détestez tant.

Avais-je raison de vous dire que cette ennuyeuse histoire ne vous servirait à rien ; elle est plate par sa nature. Tout se passe en discours dans l’amour-vanité. Les discours racontés ennuient ; la plus petite action vaut mieux.

Ensuite, ce n’est pas, je crois, ici l’amour-vanité comme vous l’entendez. Félicie a un trait rare, s’il ne lui est point particulier ; c’est que c’est une chose désagréable pour elle que de faire son métier de femme, et qu’il lui importait fort peu de faire croire à l’homme qu’elle proclamait son amant, de lui faire croire, dis-je, qu’elle l’aimait réellement.

Goncelin
fin du second et dernier volume