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Page:Stendhal - De l’amour, II, 1927, éd. Martineau.djvu/62

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gens pour s’en moquer, et on lui cite à ce sujet un mot de Louis XIV sur Versailles.

À Florence on dit : il nostro Benvenuti, comme à Brescia il nostro Arrici ; ils mettent sur le mot nostro une certaine emphase contenue et pourtant bien comique, à peu près comme le Miroir parlant avec onction de la musique nationale, et de M. Monsigny le musicien de l’Europe.

Pour ne pas rire au nez de ces braves patriotes, il faut se rappeler que, par suite des dissensions du moyen âge, envenimées par la politique atroce des papes[1], chaque ville hait mortellement la cité voisine, et le nom des habitants de celle-ci passe toujours dans la première pour synonyme de quelque grossier défaut. Les papes ont su faire de ce beau pays la patrie de la haine.

Ce patriotisme d’antichambre est la grande plaie morale de l’Italie, typhus délétère qui aura encore des effets funestes longtemps après qu’elle aura secoué le joug de ses petits p… ridicules. Une des formes de ce patriotisme est la haine inexorable pour tout ce qui est étranger. Ainsi ils trouvent les Allemands bêtes, et se mettent en colère quand on leur dit ; « Qu’a produit l’Italie dans le XVIIIe siècle, d’égal à Catherine II ou à Frédéric le Grand ? Où avez-vous

  1. Voir l’excellente et curieuse Histoire de l’Église, par M. de Potter.