Aller au contenu

Page:Stendhal - Lucien Leuwen, III, 1929, éd. Martineau.djvu/212

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

les roches de la Sainte-Baume, à quelques lieues de Marseille.

— Que ne se fait-il moine ?

— Il croit qu’il n’y a pas de Dieu, ou que s’il y en a un, il est méchant.

— Cela n’est pas si bête, dit M. Leuwen.

— Mais cela est plus méchant, dit madame Leuwen, et me confirme dans mon horreur pour lui.

— C’est bien maladroit à moi, dit Lucien, car je voulais obtenir de mon père qu’il entendît le récit de ma campagne fait par ce fidèle aide de camp, qui souvent n’a pas été de la même opinion que moi. Et jamais je n’obtiendrai une seconde séance de mon père si vous ne sollicitez pas avec moi, dit-il en se tournant vers sa mère.

— Pas du tout, cela m’intéresse, cela me ramène sur mes lauriers de l’Aveyron, où j’ai eu cinq voix de légitimistes, dont deux au moins croient s’être damnés en prêtant serment, mais je leur ai juré de parler contre ce serment, et ainsi ferais-je, car c’est un vol.

— Oh ! mon ami, c’est tout ce que je crains, dit madame Leuwen. Et votre poitrine ?

— Je m’immolerai pour la patrie et pour mes deux ultras, à qui j’ai fait commander par leur confesseur de prêter ser-