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Page:Stendhal - Pages d’Italie.djvu/202

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fait. Encore huit ou dix ans, et ce bonheur que je regrette de ne pas suivre, sera à jamais impossible pour moi. Qui songe à aimer à quarante ans !

Les plus beaux souvenirs de l’espèce humaine et ses regrets les plus profonds se lient aux rivages de cette mer que j’ai sous les yeux. C’est sur les rivages baignés par ces ondes qui se brisent à trois pieds de mon crayon qu’eurent lieu les événements les plus intéressants de l’histoire de l’espèce humaine et tout ce que le genre humain possède de liberté, de bonheur, de pouvoir sur le reste de la nature, et de science, nous ramène, si nous en cherchons l’origine, à ces rivages enchanteurs de la Méditerranée.

Mais le génie du christianisme et son allié intime, le génie du despotisme, sont venus placer les exemples du dernier avilissement et du dernier malheur sur ces mêmes rivages de la Grèce et de l’Espagne qui, sous l’empire de Jupiter Olympien et de l’Apollon de Delphes, étaient aussi heureux par leurs habitudes morales et par leur climat.

Ici j’entends le bruit des coups de fusil et des moltarelti (petits mortiers) tirés en l’honneur de la Sainte-Vierge par ces habitants avares et voleurs qui interrompent à peine la solitude de ces montagnes si