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Page:Stendhal - Pensées, II, 1931, éd. Martineau.djvu/175

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pensées

Le corps a trois facultés la faculté nutritive
la faculté motrice
la faculté générative.
l’esprit a deux espèces de facultés connaître ou concevoir
imaginer ou se mouvoir.
*

(Paragraphe 13, chap. IX, page 95) : il existe une manière d’être[1] qui n’a point de nom, mais elle se manifeste par un changement dans la physionomie qu’on appelle le rire qui annonce toujours la joie[2]. Jusqu’à présent personne n’a pu nous dire de quelle nature est cette joie, ce que nous pensons et en quoi consiste

  1. Hobbes dit : passion.
  2. Le rire avec soubresaut : oui. Car il y a le sourire de Talma lorsqu’il dit :
    J’étais né pour servir d’exemple à ta colère.

    Dans le sourire il a les dents serrées (voir le tableau du juge). Le sourire annonce toujours une douce satisfaction, même celui de Talma, même celui du Juge. Oreste pense : enfin, je serai délivré du tourment d’espérer et de voir à chaque instant, mes espérances trompées. Je suis arrivé au comble du malheur, je n’ai plus rien à craindre. Le juge se dit : N’est-ce que çà ? il ne sourit pas dans le moment de la pointe de la douleur, il jette un cri, un moment après compare la douleur sentie à la douleur redoutée, et trouvant la première moindre il se voit délivré du tourment de craindre. Il sourit donc par la conception d’un bonheur.

    Ce sourire nous peint les affreuses douleurs qui ont précédé le supplice, le reste du corps nous peint les douleurs actuelles. Ce tableau du juge nous montre donc une douleur présente qui est à nos yeux le maximum des douleurs, et il nous fait concevoir une douleur passée encore plus grande. Le sourire est donc toujours signe de plaisir.