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Page:Stendhal - Romans et Nouvelles, I, 1928, éd. Martineau.djvu/49

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LE ROSE ET LE VERT

rible. Mina écoutait les récits du général. Elle laissa passer le petit avertissement de l'orchestre ; Hartberg commençait sa seconde valse qui était ravissante. Mina n'y faisait aucune attention. Le jeune homme qui avait obtenu sa promesse se tenait à deux pas d'elle, tout étonné. Enfin, elle se souvint de lui et un petit signe de la main l'avertit de ne pas interrompre ; le général décrivait le magnifique jet d'eau de Saint-Cloud qui s'élance jusqu'au ciel, la chute vers le vallon de la Seine de ces charmants coteaux ombragés de grands arbres, site délicieux et qui n'est qu'à une petite heure du théâtre de l'Opéra Buffa. Oserons-nous le dire, c'était cette dernière image qui faisait tout oublier à Mina. En Prusse on a bien de vastes forêts, forêts très belles et fort pittoresques, mais à une lieue de ces forêts-là, il y a de la barbarie, de la misère, de la prudence indispensable, sous peine de destruction. Toutes choses tristes, grossières, inguérissables, et qui donnent l'amour des salons dorés.

Le second valseur arriva bientôt tout rouge de bonheur ; il avait vu passer tous les couples, Mina ne dansait pas ; quelque chose s'était opposé à ce qu'elle donnât la main à son premier partner ; il avait quelque espoir de danser avec elle, il était