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Page:Stendhal - Rome, Naples et Florence, III, 1927, éd. Martineau.djvu/179

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jeune peuple ? Quels hommes ont réglé son destin ?

Quand Buonaparte entra à Milan, l’archiduc Ferdinand d’Est, prince faible et aussi bon que peut l’être un homme faible, y était le timide préfet du conseil aulique de Vienne. Une digue se rompait-elle, il fallait écrire à Vienne, et quand, au bout de deux mois, la somme nécessaire était allouée, le dommage était centuplé ; le conseil aulique le savait mieux que personne ; mais l’esclave est tellement vigoureux, qu’on ne saurait trop l’enchaîner.

Joseph II, tête étroite, élève de Raynal, venait de supprimer les moines et d’ôter à la noblesse tous les privilèges dont elle jouissait comme ordre. Toute l’armée italienne se composait alors de quatre-vingt-seize gardes de ville, habillés en rouge, qui faisaient le service dans Milan.

Cette capitale du plus riche pays de l’univers comptait quatre cents familles à cent mille livres de rente, et vingt à un million, qui ne savaient que faire de leur opulence. Tout était à vil prix à Milan, et un Italien n’a pas le quart des besoins d’un habitant de Paris. Ainsi, le général prince Belgiojoso, qui s’était gorgé d’or au service de l’Autriche, faisait jeter tous les matins vingt livres de poudre dans un