Aller au contenu

Page:Stendhal - Vie de Napoléon.djvu/324

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

de peine à lui persuader qu’il ne voulait pas rire ; alors le soldat lui dit : « Où comptez-vous dormir cette nuit ? » et en apprenant le nom du village : « Hé bien ! dit-il, ma mère habite à trois lieues d’ici, je m’en vais lui dire adieu et je serai avec vous ce soir. » Le soir en effet le grenadier frappa sur l’épaule du colonel et ne fut content que quand celui-ci eut promis qu’ildirait à l’empereur que Melon le grenadier était venu partager la fortune de son ancien maître.

Le 5, Napoléon passa la nuit à Gap où il fut gardé seulement par dix cavaliers et quarante grenadiers. Le général Cambronne occupa le même jour avec quarante grenadiers le pont et l’ancienne forteresse de Sisteron[1] ; mais Melon était toujours la seule recrue qu’on eût faite, de sorte qu’à Saint-Bonnet et dans d’autres villages, les habitants voulaient sonner le tocsin et se lever en masse pour accompagner la petite armée. Ils obstruaient les routes et souvent empêchaient la marche pour voir et toucher l’empereur qui quelquefois marchait à pied.

Les routes étaient exécrables à cause de la neige fondante. Le mulet chargé d’or glisse dans un précipice. L’empereur en

  1. Hobhouse, 126.