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Page:Stendhal - Vies de Haydn, de Mozart et de Métastase, 1928, éd. Martineau.djvu/362

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talent d’écrire, il eût sur-le-champ tracé la situation du nègre Monostatos, venant dans le silence de la nuit, au clair de lune, dérober un baiser sur les lèvres de la princesse endormie. Le hasard a fait ce que les amateurs n’avaient rencontré qu’une fois dans le Devin du village, de Rousseau. On peut dire, de la Flûte enchantée, que le même homme a fait les paroles et la musique.

L’imagination toute romantique de Molière dans Don Juan, cette peinture si vraie d’un si grand nombre de situations intéressantes, depuis le meurtre du père de donna Anna, jusqu’à l’invitation faite à la statue, parlant à elle-même, la réponse terrible de cette statue ; tout cela encore est merveilleusement dans le talent de Mozart.

Il triomphe dans l’accompagnement terrible de la réponse de la statue, accompagnement absolument pur de toute fausse grandeur, de toute enflure : c’est, pour l’oreille, de la terreur à la Shakspeare.

La peur de Leporello, lorsqu’il se défend de parler au commandeur, est peinte d’une manière très comique, chose rare chez Mozart ; en revanche, les âmes sensibles retiennent de cet opéra vingt traits mélancoliques ; même à Paris, qui ne se souvient pas du mot

Ah rimembranza amara !
Il padre mio dov’è ?