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Page:Stern - Mes souvenirs, 1880.djvu/271

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d’une société dont les éléments, anciens et nouveaux, n’avaient jamais pu se fondre entièrement et dont la dispersion fut rapide. Des voyages, de longs séjours en Suisse, en Italie, en Allemagne, en Angleterre, en Hollande, etc., mes études, mes travaux, me mirent, à partir de l’année 1835, en relation avec les hommes de cœur et d’intelligence qui préparaient dans tous les pays, dans toutes les classes, l’avènement d’une société nouvelle. À mon retour, j’essayai de rendre l’hospitalité que j’avais reçue. J’accueillis en ma maison des étrangers, exilés ou voyageurs, qui venaient chercher en France le repos ou le travail. Du mélange de ces éléments cosmopolites il se forma à mon foyer, sous l’ascendant de l’esprit français, une intimité charmante et comme une petite république pleine de grâce et de douceur. Puis enfin, toutes choses changées encore dans nos rêves et dans nos mœurs politiques, après un nouveau dispersement, j’ai vu se reformer peu à peu autour de moi, des débris, des épaves de tous ces mondes divers, un noyau, ce serait trop dire, une sorte de nébulosité intellectuelle, mise en mouvement par une même attraction, retenue par un même désir : le désir de retrouver ensemble, s’il se peut, quelque chose des entretiens, des agréments, des intimités délicates de cette société polie dont la France donnait jadis à l’Europe le parfait modèle.

Les images et les réflexions qui naissent dans mon