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Page:Stern - Mes souvenirs, 1880.djvu/41

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coups du sort, qui me dérobait parfois, comme dans un nuage, aux poursuites de mes ennemis, et, quand toute force m’abandonnait, faisait soudain jaillir sous mes pas une source cachée où se retrempait mon courage.

Cet esprit bienfaisant, quel est-il ?

Serait-ce l’âme de la constellation sous laquelle je suis née[1] ? Serait-ce, comme le démondaïmôn — de Platon, le messager qui me parle selon Dieu pendant mon sommeil ? L’appellerai-je, avec les dévots, mon bon ange ? avec Marc-Aurèle, le Génie qui est au dedans de nous ? avec Dion Chrysostôme, la puissance qui commande chez chaque homme et qui est l’inspiratrice de ses actions ? Reconnaîtrai-je, dans mon divin consolateur, la pensée fidèle d’un être à qui je fus chère ? Serait-ce sous l’empire de ce démon inconnu[2] que, pendant l’espace de dix années, je fus soumise à des intermittences étranges d’une somnolence pénible, où la vie du rêve et la vie de la réalité se confondaient en moi d’une manière très-mystérieuse ; où je me sentais, sans jamais en perdre la conscience, dans un

  1. « La conjonction des astres était heureuse, » dit Goethe, (Poésie et Vérité, l re partie, livre I er ) — en parlant du jour et de l’heure où il vint au momie — « Le soleil entrait dans le signe de la Vierge ; Jupiter et Vénus le regardaient favorablement ; Mercure n’était pas hostile ; Saturne et Mars se montraient indifférents…… »
  2. Appendice F.