Aller au contenu

Page:Sterne - Œuvres complètes, t3-4, 1803, Bastien.djvu/423

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

« À la manière dont elle me parla, et à son habillement que je commençai à regarder alors plus attentivement, je vis que la jeune femme ne pouvoit pas être la fille du paysan.

» Elle étoit vêtue de noir de la tête aux pieds, et ses cheveux étoient cachés sous une bande de batiste qui serroit son front. C’étoit une de ces religieuses dont monsieur sait qu’il y a un grand nombre en Flandre, et qui ne sont pas cloîtrées. » —

« D’après ta description, Trim, dit mon oncle Tobie, je juge que c’étoit une jeune béguine. — C’est une espèce de religieuse qui ne se trouve qu’en Flandre et à Amsterdam. Elles différent des religieuses ordinaires, en ce qu’elles peuvent quitter le cloître pour se marier. Leur profession est de visiter et de soigner les malades ; j’aimerois mieux, je l’avoue, que ce fût leur inclination. » —

« Celle-ci m’a souvent dit, répliqua Trim, qu’elle me rendoit tous ces soins pour l’amour de Jésus-Chrit. — Je n’aimois pas cela. — J’aurois voulu que ce fût un peu pour l’amour de moi. — Je crois, Trim, dit mon oncle Tobie, que nous pourrions bien avoir tort tous les deux ; nous le demanderons ce soir à M. Yorick, chez mon frère Shandy ; n’oublie pas, Trim, de m’en faire souvenir. » —