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Page:Sterne - Œuvres complètes, t3-4, 1803, Bastien.djvu/448

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n’avoit point ce regard de l’amitié qui interroge la souffrance. —

Un autre que mon oncle Tobie n’auroit pas répondu, ou auroit répondu avec embarras. —

« Mon aine, frère Shandy, répondit mon oncle Tobie, va beaucoup mieux. »

À ce mot, tout le monde éclata de rire, hors mon père, qui avoit beaucoup espéré de son âne, et qui, fâché de la méprise de mon oncle Tobie, auroit bien voulu revenir à la charge. Mais mon pauvre oncle Tobie avoit l’air si déconcerté, si embarrassé, que si vous eussiez été là, madame, avec le cœur que je vous connois, vous seriez venue à son secours. — C’est ce que fit ma mère.

« Tout le monde, dit ma mère, assure que vous êtes amoureux, frère Tobie ; et nous espérons que cela est vrai. » —

« Je suis amoureux, ma sœur, répliqua mon oncle Tobie ; et plus même, je crois, qu’on ne l’est communément. — Ouais ! dit mon père. — Et depuis quand le savez-vous, dit ma mère ? » —

« Depuis que mon clou a percé, dit mon oncle Tobie. » Cette réponse mit mon père de bonne humeur ; et il entreprit encore une fois mon pauvre oncle Tobie.